Les Maine Coons étaient en grande partie polydactyles avant la reconnaissance officielle de la race, dans les années 1970. Les polydactyles ont ensuite été enregistrés au livre des origines et utilisés en élevage, mais interdits en exposition. En effet, la polydactylie n'existait pas dans d'autres races félines quand le Maine Coon a été accepté comme race et tous les autres standards (un standard est une norme, en fait) mentionnaient 5 doigts à l'avant et 4 à l'arrière. L'intérêt croissant des éleveurs pour les expositions a donc causé la quasi-disparition des polydactyles. Pendant près de 40 ans, leur nombre a régulièrement diminué mais, dans les années 2000, des éleveurs du monde entier se sont rassemblés pour sauver cette caractéristique de la disparition totale. Aujourd'hui, elle est en constante expansion.
La polydactylie se définit comme la présence de doigts plus nombreux que la normale : ce nom provient de mots issus du grec « poly » signifiant « nombreux » et « dactyle », qui signifie doigt. La polydactylie peut être congénitale ou héréditaire.
Il y a deux formes de polydactylie : pré-axiale et post-axiale :
Chez l'homme, la polydactylie est généralement post-axiale, c'est-à-dire qu'elle produit un petit doigt en plus, alors que chez le chat elle est normalement pré-axiale, le doigt supplémentaire étant du côté du pouce sur la patte. Certaines formes de polydactylie sont l'expression de pathologies génétiques, mais pas celle qui donne au Maine Coon ses pattes particulières.
La polydactylie existe depuis la préhistoire. Les plus anciens quadrupèdes connus, Ichthyostega et Acanthostega, avaient 7 ou 8 doigts par membre. Les doigts supplémentaires des quadrupèdes ont disparu il y a 350 millions d'années : les quadrupèdes modernes ont en général 5 doigts par membre au maximum. Les chats polydactyles ont plus de 5 doigts aux pattes avant et plus de 4 aux pattes arrière sur 1, 2, 3 membres ou les 4.
La polydactylie existe chez plusieurs espèces de vertébrés : l'humain, le chat, le chien, le cheval, les bovins, les oiseaux, les reptiles etc. avec des caractéristiques un peu différentes. Chez l'humain, la polydactylie est assez fréquente : elle est signalée pour environ 2 enfants sur 1000.
Elle est connue depuis longtemps : Darwin en parle déjà dans les années 1850. Il écrit : « J'ai entendu parler de plusieurs familles de chats à 6 doigts, dans l'une d'elles cette particularité est transmise depuis au moins 3 générations ».
La polydactylie des chats est répandue dans le monde. On trouve des chats polydactyles notamment en Amérique du nord, où ils sont très répandus dans certaines régions, mais aussi en Grande-Bretagne où ils sont assez fréquents, dans certaines parties de l'Europe continentale, surtout nordique et en Asie. Ils sont quasiment inexistants dans une grande partie de l'Europe, sans doute parce que les chats à l'aspect inhabituel ont été exterminés à cause des superstitions liées à la sorcellerie, éliminant pratiquement la particularité.
Les chats polydactyles étaient considérés comme porte-bonheur par les marins. En Norvège, les chats polydactyles sont connus comme des « chats de bateaux » car on pense que les doigts supplémentaires leur confèrent un meilleur équilibre par temps de tempête. Les marins estimaient aussi que les chats polydactyles étaient de meilleurs chasseurs de rats et souris. Utilisés comme ratiers et porte-bonheur sur les navires, ils auraient atteint l'Amérique avec les premiers colons britanniques, d'où leur plus grande fréquence dans les états de l'Est.
Les plus célèbres chats polydactyles contemporains sans pedigree sont les chats d'Hemingway, une cinquantaine de chats de gouttière qui vivent dans le parc de la maison historique de l'écrivain, à Key West, en Floride (USA).
Le chat, quelle que soit sa race, présente une forme pré-axiale de polydactylie, c'est à dire que le ou les doigts supplémentaires se trouvent du côté du doigt numéro 1 (le pouce chez l'homme).
Les chats peuvent être polydactyles soit uniquement sur les antérieurs, soit sur les antérieurs et les postérieurs, mais on a très rarement observé des chats polydactyles uniquement sur les postérieurs.
Certains cas de polydactylie sont signalés uniquement aux membres postérieurs pourraient s'expliquer :
La polydactylie est due au gène Pd, autosomique dominant. Le gène Pd est inoffensif même en cas d'homozygotie et on ne lui connaît pas d'association avec d'autres anomalies.
Alexia Hamelin a montré dans sa thèse que 3 mutations ponctuelles variantes de Pd (Hw, UK1 et UK2), sont responsables de la polydactylie chez le chat sans pedigree, le chat « de gouttière ». L'une de ces mutations, Hw, est caractéristique des chats d'Hemingway. Elle est légèrement différente des variantes trouvées chez les chats de Grande-Bretagne (UK1 et UK 2).
Pour faire naître un chat polydactyle, il faut qu'au moins un des parents soit polydactyle. La probabilité de naissances de polydactyles est de 50% en cas de mariage entre un chat polydactyle hétérozygote pour cette caractéristique et un non polydactyle (cf. Punnett ).
Des mentions de la polydactylie chez le Maine Coon remontent à 1876 et il est reconnu que le Maine Coon traditionnel était fréquemment polydactyle, la polydactylie étant très commune dans la partie septentrionale du nord-est des Etats-Unis.
La variante du gène Pd trouvée chez le Maine Coon est en général Hw. Aucun effet négatif du gène polydactyle n'est référencé chez le Maine Coon : son seul effet est de produire des doigts supplémentaires sur les pattes, même en cas d'homozygotie. Sa pénétrance est complète : un chat porteur de la mutation est forcément polydactyle.Le gène Pd chez le Maine Coon est d'expression variable : il peut produire un nombre variable de doigts. Différents phénotypes sont associés au gène mais les plus fréquents sont la « patte en moufle » et la « patte en hamburger ». Lange et al. (2014) ont montré que sur les 378 chats présentant la mutation Hw qu'ils ont étudiés, seulement 47% des phénotypes polydactyles concernaient uniquement les membres antérieurs, les autres concernaient les membres antérieurs et postérieurs.
En fait, la mutation Hw cause de nombreux phénotypes allant jusqu'à 8 doigts supplémentaires. Les chats peuvent aussi avoir un ergot. Les associations félines qui autorisent les Maine Coons polydactyles en compétition acceptent au maximum 7 doigts aux pattes avant.
Ci-dessus : configurations notées par C.H. Danforth, à gauche la patte « normale ». |
Ci-dessus : différents types de mutation HW schématisées par Axel Lange. En haut : pattes avant droites, en bas : pattes arrière droites. Wildtype : type sauvage, la configuration « normale ». |
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À ce jour, on a trouvé la mutation Hw chez tous les Maine Coons polydactyles étudiés, sauf ceux de la lignée canadienne. La mutation à l'origine de la polydactylie dans cette lignée est encore inconnue.
Les chats sont polydactyles aux antérieurs et aux postérieurs, avec un aspect le plus souvent en raquette (toujours pour les postérieurs, le plus souvent pour les antérieurs). La configuration des pattes des chats de la lignée canadienne est fréquemment symétrique et les chats présentent le plus souvent 6 doigts à chaque patte. Axel Lange note que cette configuration est connue et préférée par les éleveurs et qu'elle peut donc avoir été stabilisée via la sélection humaine.
Le plus souvent, les chats sont polydactyles uniquement aux antérieurs, avec un aspect en moufle. Les chats ont alors 20 doigts : 6 doigts aux antérieurs et aucun doigt surnuméraire aux postérieurs. La seconde configuration la plus fréquente est de 6 doigts aux antérieurs et 5 aux postérieurs. La plupart du temps, la configuration des pattes est symétrique.
L'expression de la polydactylie chez le Maine Coon est très variable au niveau des doigts et sur l'architecture des carpes et des tarses. Cette grande variabilité s'accompagne de caractéristiques morphologiques communes au sein d'une lignée.
Alexia Hamelin a notamment constaté sur les chats qu'elle a étudiés :
Pour résumer, on peut donc dire que la polydactylie du Maine Coon se caractérise par des doigts surnuméraires sans aucune autre conséquence sur la morphologie ou la santé du chat. C'est un caractère purement esthétique, qui se transmet sur le mode autosomique dominant à pénétrance complète et expressivité variable.
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