Le gène Orange (locus O), qui régit le roux (« red » en félinotechnie), est un drôle de numéro :
Le noir a probablement été la première mutation de couleur, suivie du roux et du blanc. Les chats roux sont apparus en Asie, mais on pense qu'ils se sont dispersés en Europe grâce aux Vikings. Le roux est donc très répandu en Écosse, qui avait des liens étroits avec la Scandinavie, mais il est moins fréquent dans les régions du sud de la Grande-Bretagne, où le noir est plus courant.
O régit la production de la phéomélanine et a 2 allèles, Orange (O) et non orange (o).
O élimine tout le pigment de mélanine (brun à noir) des fibres capillaires et le remplace par la phéomélanine, dont les granules réfractent la lumière dans une gamme rouge-orange-jaune, donnant ainsi un pelage jaune à orange en fonction de la densité des granules de pigment. En cas de dilution, la couleur apparaît crème ou chamois.
(o) bloque le pigment jaune et ne permet que la formation de pigment brun à noir (bleu en cas de dilution).
Le gène O se décline dans différentes nuances. Les chats de qualité exposition ont souvent un roux riche et profond, dû à la sélection des éleveurs, alors que les chats de gouttière sont plus souvent de couleur plus pâle Chez les chats issus de populations aléatoires, le roux va d'une teinte jaune ou sable à un roux profond en raison d'un mélange plus important de p olygènes. Les premiers chats roux exposés, en 1880, étaient dits « jaunes » et c'est la sélection des éleveurs qui a fait évoluer leur couleur vers le roux intense que nous connaissons.
Le roux masque toutes les couleurs à base de noir présentes sur les autres chromosomes, mais ces couleurs masquées semblent influencer la profondeur du roux. Le roux masquant le noir tend à être très intense et chaud, comme le roux masquant le cinnamon. Le roux masquant le chocolat est moins intense. Le crème est aussi influencé par la couleur masquée : le crème masquant le lilas peut être une nuance de crème très délicate. Le crème masquant le fawn est encore plus pâle, mais plus chaud que le crème masquant le lilas.
O est un gène gène lié au sexe car il est situé sur le chromosome X, un des 2 chromosomes qui déterminent le sexe chez les mammifères (l'autre chromosome sexuel est nommé Y et est lié au sexe mâle). Une femelle est XX et un mâle XY. Dans le cas de O, c'est la femelle qui détermine la couleur du mâle en donnant un X porteur ou non porteur de O, pour la femelle, ce sont les 2 parents car ils donnent chacun un X.
Une chatte ayant 2 chromosomes X, elle porte donc deux allèles du gène O et peut de ce fait avoir :
Un chat mâle n'ayant normalement qu'un seul chromosome X, il peut donc avoir :
La coloration des taches non orange est due à d'autres gènes de pigmentation, au fonctionnement indépendant de O.
Y aurait-il moins de chattes que de chats roux ? Oui, parce qu'il existe plus de combinaisons de couleurs possibles pour elles : environ 80 % des chats roux sont des mâles et seulement 20 % sont des femelles.
Une chatte écaille est XO/Xo : génétiquement, une écaille est en fait orange et non orange en même temps. En cas de couleur non diluée (noir, seal, brown tabby, chocolat, cinnamon), les taches sont rousses. Pour les couleurs diluées (bleu, lilas, fawn), les taches sont crème. C'est un phénomène appelé mosaïcisme (coexistence, chez un même individu, de 2 ou plusieurs populations cellulaires de génotypes différents).
Les taches peuvent être grandes ou plutôt petites, bien délimitées ou mêlées. Les femelles rousses hétérozygotes, sans panachure, sont écaille de tortue avec de petites taches marquées. Les femelles rousses hétérozygotes avec blanc, qui portent un allèle de panachure (Ws), ont des taches beaucoup plus grandes de couleur solide non rousse, juxtaposées à des taches rousses présentant des motifs tabby plus ou moins marqués (cf. ci-dessous). Ces chattes sont parfois nommées calico.
Dans le folklore de nombreuses cultures, on considère que les chattes écaille portent chance. Depuis des millénaires, les chattes écaille sont réputées apporter la chance à leur maisonnée. Aujourd'hui encore, les Irlandais et les Écossais croient qu'elles portent chance, et au Japon elles portent bonheur.
Les chattes écaille passent pour être têtues, dominantes, plus sensibles aux stimuli extérieurs, voire un peu folles (en anglais on parle de « tortietude »).Les propriétaires de torties en sont convaincus, même si aucune preuve scientifique ne le confirme. Comme elles sont génétiquement de deux couleurs à la fois, se pourrait-il qu'elles aient une personnalité un peu différente ?
Les matous écaille sont dus à des accidents génétiques. On en connaît 2 types :
Chez les mammifères, les femelles sont XX et les mâles XY. Le chromosome Y comporte très peu de gènes, aucun n'étant nécessaire à la survie de la cellule, mais il est essentiel au processus de masculinisation. Le X contient des centaines de gènes, dont beaucoup sont essentiels à la survie des cellules. La longueur génétique totale du chromosome X du chat est plus grande que celle connue chez les autres mammifères.
Un processus nommé inactivation de l'X ou lyonisation (du nom de Mary Lyon, qui l'a découvert) empêche la femelle d'exprimer deux fois plus de produits de gènes liés à l'X, ce qui causerait des anomalies. à un certain moment du développement embryonnaire des mammifères femelles, un des deux chromosomes X de chaque cellule s'inactive. Il ne reste qu'un seul X actif dans chaque cellule de l'embryon femelle et seuls les allèles du chromosome actif sont exprimés. Le X inactivé reste ainsi pendant toute la vie de la cellule et, quand elle se divise, ses cellules filles gardent le même schema d'inactivation.
Le processus fonctionne pour tous les mammifères placentaires femelles (pas pour les marsupiaux !) mais chez les chats écaille de tortue, c'est visible. Une chatte hétérozygote pour O est un patchwork de cellules à X actif et à X inactivé. Si une chatte hérite d'un X avec l'allèle non orange et d'un autre avec l'allèle Orange, chaque cellule a les 2 versions, mais à cause de l'inactivation de l'X certaines de ses cellules de peau codent pour l'orange et d'autres pour le non orange. L'inactivation de l'X étant aléatoire, on ne peut pas prédire quelles cellules coderont pour l'orange et lesquelles coderont pour le non orange : chaque chatte écaille de tortue est donc unique.
En résumé, pour chaque cellule :
Les taches plus grandes peuvent être causées par :
Si un chat mâle hérite de deux chromosomes X en plus de son chromosome Y, chaque cellule de l'embryon subit une lyonisation, comme chez une femelle. Si les deux chromosomes X ne portent pas le même allèle, le mâle exprime une coloration tortie, tout comme une femelle.
Le premier chat cloné était Rainbow, une chatte calico, dont une cellule est devenue une chatte nommée CC, Copie Carbone, de couleur bleue et et blanche La cellule qui a conduit à CC était donc une cellule dans laquelle l'allèle non orange était actif et l'allèle orange inactif.
Tous les chats roux sont en fait tabby car le gène non-agouti (qui transforme un tabby en solide) ne fonctionne pas sur le pigment rouge. D'autres gènes, appelés polygènes ou modificateurs, contrôlent l'intensité de la couleur et le contraste entre les marques et la couleur de fond. Les « polygènes rufus » (non encore identifiés) régissent la profondeur du roux.
Les chats roux uni sont enregistrés comme tels, mais ils sont en fait tabby, même si les marques tabby sont très faiblement exprimées grâce au travail des éleveurs qui sélectionnent les chats présentant un faible contraste entre les marques et la couleur de fond. Les marques fantômes du tabby ne sont cependant jamais complètement éliminées : elles sont visibles sur la queue, les pattes, le front et le long de la colonne vertébrale. Chez les chattes écaille, le motif tabby est présent dans la fourrure rousse, indépendamment de la présence ou de l'absence de motif dans les taches non orange.
En clair, un chat génétiquement roux mâle ne peut naître que d'une mère rousse ou écaille. Un chat roux femelle ne peut naître que d'un croisement entre un chat roux mâle et une chatte rousse ou écaille.
Winston Churchill, grand amoureux des chats, a partagé sa vie avec un red tabby nommé Tango. Tout le monde connaît O'Malley, le matou séducteur des Aristochats et Garfield, le gourmand dodu incapable de résister aux lasagnes mais il y a aussi Azrael, le chat roux et blanc de Gargamel dans les Schtroumpfs, et aussi Jonesy, seul survivant avec Ripley à la fin du film Alien.
Nom des couleurs : nomenclature du LOOF
Crédit photos : Merci aux participants du groupe CoonCept sur Face Book et :
Source principale : Messybeast (ma Bible). Adaptation des illustrations avec l'aimable autorisation de Sarah Hartwell.
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