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Les origines du chat domestique

Migrations et génome des chats domestiques.

Traduction par Célyne.

Sur la piste du Chat... Les scientifiques vont de surprise en surprise.
Par Rob Stein, journaliste au Washington Post -Lundi 17 mai 2008-

(D'après les travaux de Monika J. Lipinski, University of California - UC Davis -)

Sur la piste du Chat…

S’il y a une chose que les propriétaires de chats savent de leur compagnon, c’est combien il peut être énigmatique. Mais les scientifiques commencent à lever le voile sur ses mystères et, grâce à l’usage des derniers outils moléculaires, à entrevoir ses origines.

Les chats sont sans aucun doute plus mystérieux et complexes que nous pourrions l’imaginer, indique Leslie A. Lyons, qui étudie la génétique des chats à l’école de médecine vétérinaire de l’Université de Californie, à Davis. Cependant, nous commençons à comprendre leur histoire. Pour mettre au point l’une des études les plus exhaustives sur l’origine des chats à ce jour, L. Lyons et ses collègues ont passé plus de 5 ans à récolter de l’ADN félin, retroussant les babines de plus de 1 100 persans, siamois, chats des rues et gouttières domestiques du monde entier pour leur frotter un écouvillon dans la gueule.

Les échantillons ainsi prélevés provenaient de 22 races courantes de chats, majoritairement issus des états-unis, avec un assortiment de harets Chats domestiques retournés à la vie sauvage. et de chats domestiques de Corée, Chine, Kenya, Israël, Turquie, Viet-Nam, Singapour, Sri Lanka, Tunisie, égypte, Italie, Finlande, Allemagne, états-Unis et Brésil. En analysant 39 marqueurs génétiques par échantillon, les chercheurs détenaient les moyens de répondre à un grand nombre de questions, incluant quelles sont les races les plus proches entre elles et quelles sont leurs origines les plus probables.

Les marqueurs
Ils sont recherchés dans l'ADN issu des cellules buccales prélevées par frottis.
- Un marqueur n'est pas un gène mais une séquence nucléotidique qui est une balise sur un chromosome.
- Les marqueurs, présents dans les différentes populations d'une espèce, tracent à la fois la parenté et l'évolution.

La première chose que fit le groupe de scientifiques fut de confirmer une étude publiée dans la revue Science en juin dernier, qui révélait que la domestication des chats était apparue, il y a 10 000 ans, dans une zone connue sous le nom de “Croissant fertile”, qui s’étend de la Turquie à l’Afrique du Nord et aux actuels Irak et Iran. Nos données confirment le Croissant fertile, et particulièrement la Turquie, comme l’un des terrains originels des chats, dit L. Lyons, qui a publié ses découvertes dans l’édition de janvier du journal Genomics. La Turquie, faisant partie du Croissant fertile, était de ce fait l’une des zones les plus anciennes de développement agricole. Les chats ont probablement commencé à vivre auprès des humains lorsque ceux-ci ont évolué du nomadisme vers l’élevage du bétail, la culture et les provisions de nourriture attirant ainsi souris et autres rongeurs. Les chats trouvaient là de quoi chasser et les humains appréciaient très certainement l’aide du rusé petit prédateur pour protéger leurs réserves.

Les routes migratoires
Chacune est caractérisée par certains allèles des gènes emportés par le groupe des migrants, et ne représentant qu'une partie du patrimoine complet du groupe d'origine.
Ainsi, chaque sous-population peut être " isolée " de sa population mère par le pool d'allèles qu'elle possède.

Les voies migratoires des populations félines

Les avantages étaient partagés, précise L. Lyons. Il y avait profusion de souris et de rats autour du grain. C’était donc profitable pour les chats comme pour les humains, alors même que les chats se rapprochaient de la population humaine et, en quelque sorte, se domestiquaient eux-mêmes. Dès lors, les chats domestiques commencèrent à rayonner vers différentes parties du monde, suivant souvent les humains dans leurs propres migrations.

Aujourd’hui, les chats peuvent être génétiquement divisés en quatre larges catégories : Ceux provenant d’Europe, de la Méditerranée, d’Afrique de l’Est et d’Asie. Mais L. Lyons et ses collègues ont fait également de surprenantes découvertes au sujet des races établies : Nous voulions déterminer à quel point les différentes races provenaient effectivement de ce qui était supposé être leur origine géographique. Le Bobtail japonais, par exemple, ne semble pas génétiquement proche des chats autochtones du Japon, ce qui indique que la race pourrait trouver son origine ailleurs. Soit il n’est pas originaire du Japon, soit il y a eu tellement d’influence occidentale qu’il a perdu son “signal” génétique originel, précise L. Lyons. Malgré son nom, le Persan, la plus ancienne race reconnue, semble être native d’Europe de l’Ouest et non de Perse, l’actuel Iran. S’il était originaire d’Iran, nous serions en droit d’attendre qu’il ressemble aux chats de Turquie ou d’Israël. Au lieu de quoi, le Persan ressemble davantage aux chats d’Europe de l’Ouest. Lorque les chercheurs étudièrent les gènes provenant de supposées races distinctes, ils furent incapables de trouver des différences significatives entre nombre d’entre elles.


L'héritage allélique des races félines

Interprétation
- Chaque couleur correspond à une route migratoire indiquée dans le document précédent.
- Chacune correspond à certains marqueurs génétiques (parmi les 39 utilisés).
- Deux races sont d'autant plus proches génétiquement que leurs histogrammes se ressemblent.

Prenons l’exemple du Persan et de l’Exotic Shorthair. Quand vous comparez ces deux races, vous ne pouvez distinguer l’une de l’autre, génétiquement parlant.
Les conclusions sont identiques en ce qui concerne le Birman et le Singapour, de même que le Siamois et le Havana brown : alors qu’aux états-Unis, le Havana brown est une race à proprement parler, les associations d’éleveurs européens le considère comme une variante (au niveau couleur) de siamois. Certaines personnes diront “Ha, ha, je vous l’avais bien dit”. D’autres seront déçues. Les races semblent très différentes, à cause des variations d’un seul gène, mais ce n’est pas suffisant pour les distinguer génétiquement.

Les chercheurs ont également découvert d’autres liens intéressants, qui suivent de près l’histoire de l’Homme. Les chats d’Italie ou de Tunise, par exemple, sont un mélange de chats d’Europe de l’Ouest et de la Méditerranée, reflétant ainsi probablement les liens historiques étroits entre la Tunisie et l’Europe de l’Ouest. Les chats du Sri Lanka et de Singapour sont un mélange génétique de chats d’Asie du Sud-Est, d’Europe et d’ailleurs… Ce qui pourrait être un reliquat du colonialisme birtannique d’après les chercheurs. Il en va de même pour les Abyssins. La découverte qui devrait concerner les amoureux des chats et que certaines races ont connu de tels croisement consanguins que le niveau de diversité génétique entre eux est devenu dangereusement bas. Ce qui peut conduire à une augmentation des pathologies, explique L. Lyons.

Ceci pourrait avoir des conséquences sur la santé des chats. Plus il y a de diversité génétique, mieux, en général, la population se porte. C’est pourquoi certains éleveurs doivent faire très attention à limiter la consanguinité. Les Birmans et les Singapour ont le plus faible taux de diversité génétique, alors que les Sibériens ont le meilleur, avec les Norvégiens, les Maine Coons et les Bobtails Japonais. Environ la moitié des races étudiées présentait une diversité génétique comparable à celle de chats à la reproduction aléatoire, ce qui est bien, mais dans la seconde moitié, elle était inférieure. Sans vouloir dire qu’il y a danger, c’est une donnée dont il faut tenir compte. Ces découvertes pourraient aider les éleveurs, précise L. Lyons.

Ceci est une information nouvelle et très utile, selon Susan Little, présidente de la Winn Feline Foundation, un groupement à but non-lucratif qui a participé au financement des travaux. Cela permet d’améliorer la capacité des éleveurs à réduire la prévalence des maladies en développant un plan d’élevage pour la santé. C’est extrêmement important.

Malgré une diversité génétique “timide”, les chats de race possèdent, de loin, une diversité génétique supérieure à celle des chiens de race, remarque Marilyn Menotti-raymond qui étudie la génétique féline au National Cancer Institute. Ceci parce les hommes élèvent des chats depuis plus de 200 ans et qu’il y a eu davantage de croisements que chez le chien de race.
Tout le monde est conscient des problèmes induits par le patrimoine génétique limité de certaines races de chiens, précise Marylin Menotti-Raymond qui, dans le même numéro de la revue Genomics, fait part de découvertes similaires sur un échantillon de 611 chats et 38 races. J’étais vraiment surprise du niveau de diversité génétique chez le chat. C’est une bonne chose.

Questions-réponses avec Monica Lipinsky, à propos de cet article (en anglais).

Un très vieux chat apprivoisé à Chypre. Communiqué de presse du CNRS.

Le chat et l'homme : Une histoire orientale. Le Figaro -Sciences-

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